Installé depuis ses débuts dans l’écosystème luxembourgeois, BIONEXT LAB s’est imposé en quelques années comme un acteur de référence dans le domaine du diagnostic médical. Rencontre avec son directeur, le Dr Jean-Luc Dourson, pour un tour d’horizon des mutations du secteur, des ambitions numériques et du rôle que joue la House of BioHealth dans leur développement.

 

Quelle est la mission de BIONEXT LAB aujourd’hui, et comment a-t-elle évolué depuis votre arrivée ?

En tant que laboratoire d’analyses médicales luxembourgeois, notre rôle est de réaliser des examens biologiques (sang, urine, tissus, prélèvements divers) afin de participer au diagnostic médical, au suivi du traitement et à la prévention des maladies. Spécialiste médical à part entière, au même titre qu’un radiologue, le laboratoire apporte au médecin clinicien des informations à forte valeur ajoutée pour garantir la qualité de la prise en charge. Depuis la création de Bionext en 2017, nous avons développé plusieurs outils digitaux facilitant le parcours de santé du patient et la qualité de son suivi. Nous proposons également une application de médecine préventive, BNEXTCARE, qui permet de croiser les résultats d’analyses avec le mode de vie du patient (activité physique, qualité du sommeil, habitudes alimentaires, etc.) pour calculer des scores de risque et proposer des recommandations ainsi qu’un coaching personnalisé.

 

Comment définissez-vous le rôle d’un laboratoire de biologie médicale dans le système de santé luxembourgeois ?

Le laboratoire d’analyses médicales est un maillon essentiel du parcours de santé, qui englobe les soins curatifs comme la prévention. Celle-ci vise à détecter précocement les maladies chroniques, qui représentent aujourd’hui la majeure partie des coûts de l’assurance maladie. La frontière entre soins ambulatoires et hospitaliers tend à disparaître : le patient doit être accompagné dans un parcours intégré, où le laboratoire fournit des informations médicales validées et certifiées, contribuant à une prise en charge efficace et personnalisée. Dans le contexte luxembourgeois, il faut aussi intégrer la dimension transfrontalière liée à la présence de nombreux travailleurs frontaliers, eux aussi concernés en tant que patients potentiels.

 

Le secteur du diagnostic évolue rapidement. Quelles sont, selon vous, les grandes tendances actuelles ?

Les laboratoires d’analyses médicales connaissent une mutation rapide, portée par les technologies et les réorganisations internes. L’automatisation permet de standardiser les procédures et de gérer des volumes croissants tout en réduisant la quantité de sang prélevée. Le développement des tests génétiques et moléculaires soutient la médecine personnalisée, en offrant un diagnostic plus précoce et une adaptation des traitements aux spécificités individuelles.

 

Quels types d’innovations technologiques BIONEXT LAB intègre-t-il dans ses processus ?

Au-delà des outils digitaux que nous avons développés pour améliorer le suivi patient, nos innovations portent sur la robotisation des analyses et l’introduction de tests non invasifs à haut potentiel diagnostique
Par exemple :

  • Le test ENDOTEST permet de diagnostiquer l’endométriose à partir d’un simple prélèvement de salive grâce au séquençage ARN.
  • Le test VISIOCYT permet de diagnostiquer le cancer de la vessie sur un échantillon d’urine, en utilisant l’intelligence artificielle appliquée à l’imagerie cellulaire.

L’intelligence artificielle ne sera pas notre seul moteur de transformation. Nous croyons aussi à des innovations comme le développement de robots préleveurs, capables, dans quelques années, de réaliser des prélèvements avec une précision supérieure à celle d’un humain, en s’appuyant sur des technologies d’imagerie déjà éprouvées.

 

L’intelligence artificielle et les données massives ont-elles un rôle à jouer dans vos activités ?

Les exemples que nous venons d’évoquer en sont déjà la preuve : l’IA est présente et son rôle va croissant. La prochaine révolution sera celle de la biopsie liquide, qui détecte l’ADN tumoral circulant avant même l’apparition de symptômes. L’exploitation des big data permet aussi d’identifier des tendances épidémiologiques, d’analyser les liens entre génétique et expression phénotypique, et de renforcer la proactivité en matière de décision clinique.

 

Vous attachez une grande importance à la qualité. Comment cela se traduit-il concrètement ?

Dès sa création en 2017, Bionext a engagé une démarche volontaire d’accréditation selon la norme ISO 15189. Aujourd’hui, nous sommes pleinement accrédités selon la version 2022 de cette norme, preuve d’une culture qualité partagée par tous nos collaborateurs et d’une exigence constante en matière de fiabilité des analyses et de sécurité des patients.

 

Comment assurez-vous une prise en charge fluide et accessible des patients ?

Notre stratégie repose sur une double approche : la proximité physique et la digitalisation complète du parcours de soin.

  • Physiquement, notre réseau comprend des centres accessibles sans rendez-vous, des centres itinérants (Labomobile) et un service mobile à domicile (Pickendoheem), sans surcoût. Nous avons également noué des partenariats avec les pharmacies pour renforcer notre maillage territorial.
  • Digitalement, notre équipe informatique a développé la plateforme MYLAB, un écosystème de santé numérique unique à ce jour dans le domaine, pensé pour les patients, médecins, infirmiers et hôpitaux. Pour renforcer ce développement, nous avons fondé en 2019 la société Health-IT.

 

La proximité avec les professionnels de santé est-elle un levier d’innovation ?

Absolument. Le travail coordonné entre professionnels est clé dans l’amélioration de la prise en charge. Les promoteurs immobiliers ont aussi un rôle à jouer : en développant des pôles médicaux intégrés, ils peuvent faciliter la cohabitation entre généralistes, spécialistes, laboratoires, pharmacies et services partagés.
Nous allons vers un réseau de soins interconnectés, combinant :

  • domicile (prévention, suivi),
  • centres primaires de diagnostic,
  • unités mobiles,
  • plateformes numériques.
    Dans ce modèle, la localisation devient un système d’interactions physiques et digitales, au service du patient.

 

Quelle place occupe la House of BioHealth dans ce développement ?

La House of BioHealth est bien plus qu’un simple lieu. C’est un écosystème d’innovation en santé, catalyseur de synergies entre startups, institutions publiques et acteurs privés.
Nous y sommes présents aux côtés de LLuCS, notre partenaire pour les analyses en hygiène alimentaire, eau et air.
L’initiative HIVE, lancée récemment, renforce cette dynamique en créant une plateforme de rencontres dédiée à la santé digitale.

 

Quels bénéfices tirez-vous de cet environnement partagé ?

Les échanges avec d’autres entreprises nous poussent à innover, à intégrer de nouvelles technologies et à accélérer nos projets. Cette dynamique collaborative est essentielle pour avancer dans un secteur aussi exigeant.

 

Voyez-vous des synergies renforcées à l’avenir ?

>Oui. Par exemple, dans le cadre de notre application de médecine préventive, nous étudions une collaboration avec le Luxembourg Institute of Health (LIH), dont certains programmes de recherche rejoignent nos ambitions.

Quels sont les principaux défis que vous anticipez ?

Réagir vite et investir de façon efficiente. Le principal obstacle reste la pression économique imposée au secteur de la santé, qui freine l’investissement et l’innovation, et compromet notre visibilité à court, moyen et long terme.

 

Le Luxembourg est-il un terreau favorable pour les acteurs de la santé ?

Oui. Le Luxembourg présente un potentiel exceptionnel :

  • Position géographique stratégique pour les soins transfrontaliers
  • Soutien fort de l’État à l’innovation en biotechnologies et santé numérique
  • Présence d’institutions clés comme le LIH et l’IBBL, moteurs des partenariats en R&D

Quels sont vos projets à moyen terme pour BIONEXT LAB ?

Nous projetons le déménagement de notre plateau technique vers un nouveau bâtiment dédié, à horizon trois ans. Ce projet d’implantation, à proximité du futur CHEM dans le HE:AL Campus, est actuellement en cours d’étude.

 

Si vous deviez résumer l’ADN de BIONEXT LAB en trois mots ?

Proximité – Innovation – Efficience